n°144 - 14 Août 2018
REPERES
Table-ronde : Mobiliser plus de ressources
Guy CASTELAN, Plastics Europe* :
En France, le taux de valorisation des déchets est de 65,5 %**. Les chiffres des dix dernières années montrent que la mise en décharge de ces déchets diminue tandis que leur taux de recyclage augmente.
* Plastics Europe rassemble une centaine d’entreprises qui produisent 90 % des polymères européens en Europe : www.plasticseurope.org/fr
**D’après une étude de Plastics Europe, publiée en
janvier 2018 et portant sur l’année 2016.
3,4 millions tonnes de déchets plastiques sont collectées en France par an. 64 % de ces déchets proviennent des emballages (le reste des déchets provenant de produits de plus longue durée de vie : automobile, construction, …). Le progrès le plus important à faire est dans l’emballage.
Au niveau européen, les industriels de Plastics Europe se sont engagés à un taux de réutilisation et de recyclage des emballages plastiques de 60 % en 2030 (dans le cadre d’un plan d’engagement volontaire).
Philippe MAILLARD, Président de la FNADE (depuis le 21 juin 2018) :
Rappelons que nous sommes sur une chaine de responsabilité, de celui qui produit le plastique à celui qui va l’utiliser, puis le jeter, le trier, le recycler. Le taux de recyclage des plastiques, de l’ordre de 25 %, démontre que cette chaine ne fonctionne pas bien, pour différentes raisons (manque de communication, difficulté à recycler certaines résines). Le plastique doit être recyclé à la fois sous forme de production de matière, mais également valorisé sous forme d’énergie : en effet, il ne sera pas techniquement et économiquement possible de recycler une partie des plastiques complexes en matière à l’horizon 2025. Aussi, à condition de pouvoir recycler sous forme de matière et d’énergie, les syndicats de la FNADE sont prêts à investir en R&D, en technologies, pour contribuer à atteindre l’objectif fixé par le gouvernement.
Un meilleur fonctionnement de la chaîne globale de recyclage n’exige pas nécessairement davantage de réglementations, mais des ajustements. Comme, par exemple, encourager les initiatives qui contribuent à accroître le taux de collecte des plastiques et notamment des emballages (via le développement de kiosques ou de consignes par exemple) afin d’accroître le gisement de plastique à recycler disponible. Il faut aussi soutenir la compétitivité des matières recyclées face aux matières vierges.
Enfin, le décret 5 flux*, qui invite les entreprises à trier à la source, ne prévoit aucun moyen de contrôle, d’incitation, de pénalisation, etc. : cela manque.
* Le décret dit « 5 flux » impose depuis le 1er juillet 2016,
à une grande partie des entreprises, le tri des déchets de papier, métal,
plastique, verre et bois.
Pour en savoir plus sur le texte : http://www.ecoemballages.fr/actualite/tout-savoir-sur-le-decret-5-flux ; https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000032187830&categorieLien=id
La bouteille en plastique : un produit 100 % recyclable… mais pas assez recyclé
Françoise BRESSON, Nestlé Waters, directrice de la Responsabilité sociale et environnementale (RSE) et des Evènements de marque :
Seulement, 55 % des bouteilles en plastique sont recyclés en France. Comment inciter les consommateurs à trier plus ? il faut augmenter le taux de collecte, par la pédagogie notamment. Et puis, tout le monde n’a pas accès au tri.
A Paris ou à Marseille, une bouteille en plastique sur dix est triée, seulement. Cependant, les initiatives pour favoriser la collecte dans l’espace public émergent (comme Trilib à Paris) : elles doivent être encouragées davantage. Dans la plupart des régions françaises, un consommateur terminant sa bouteille dans la rue doit, pour la recycler, la ramener chez lui. Dispositif qui a fait ses preuves hors de France (en Allemagne par exemple), la consigne est sujet à débat : les collectivités territoriales ne se montrent pas forcément en faveur de ce dispositif, arguant du fait que cela contribue à vider le bac jaune.
Chez Nestlé Waters, nous avons pris l’objectif suivant : que 80 % des bouteilles soient recyclées en 2022, 90 % en 2025 (actuellement, le taux s’élève à 56 %).
Le challenge « plastiques » de la grande distribution
Marc MURRAY, Carrefour – Responsable Qualité à la Direction des achats non marchands :
Sur les 250 000 à 300 000 tonnes de déchets produites chaque année par les sites intégrés de Carrefour, environ 10 000 tonnes sont en plastique.
Carrefour a pris plusieurs engagements en matière de déchets :
- il y a deux ans, l’engagement du zéro déchet dans les magasins. La dynamique est lancée.
Tout l’enjeu réside dans la maîtrise des matières entrant dans les magasins. Parmi nos projets : que le plastique des palettes puisse servir à réaliser des produits Carrefour, dont des sacs de caisse.
Avec la Fédération des grandes enseignes de la distribution, Perifem, nous lançons un challenge « plastiques », dont l’objectif est de caractériser les plastiques qui sont dans nos magasins. Ce challenge est le signe que les grandes enseignes de distribution travaillent ensemble sur ces sujets.
Philippe MAILLARD :
Avant tout, il faut que l’ensemble de la chaine fonctionne, et intégrer le citoyen dans la démarche, notamment en faisant en sorte que soient bien visibles sur l’emballage, sa recyclabilité et le taux d’incorporation de matières recyclées.
Carlos de LOS
LLANOS, Citeo
– Directeur scientifique :
Enjeu mondial, la question des déchets plastiques est à l’agenda des grandes institutions internationales : les pistes de solutions seront peut-être à rechercher au-delà des frontières françaises. Même le pays le meilleur de la classe, l’Allemagne, n’atteint pas les 45 % de taux de recyclage de déchets plastiques à ce jour...
L’extension des consignes de tri
Pour l’essentiel, la collecte sélective en France se limite aux bouteilles et flacons, soit 40% du total. Toutefois, le dispositif d'extension des consignes de tri des plastiques commence à s’étendre : un quart du pays est dans cette situation. Un tel développement des consignes de tri répond à l’attente des consommateurs et des élus.
La consommation hors foyer
Dans de nombreux pays, il existe plusieurs bacs de tri à disposition du consommateur dans les lieux publics. En France, on prête peu attention aux déchets produits sur la voie publique. Un champ de développement à couvrir mais ce n’est pas facile.
La tarification incitative
En France, le coût des déchets ne traduit ni l’effort de tri, ni la quantité produite par le consommateur. Or, la tarification incitative est efficace pour changer les comportements
Pascal Graindorge, Recyclage
et Valorisation
Les usagers des automates collecteurs des bouteilles en plastique sont différents des usagers des bacs à couvercle jaune : les premiers sont intéressés par la remise intégrée dans leur ticket de caisse.
Philippe MAILLARD
L’augmentation du taux de collecte sera le fruit d’une multiplicité de solutions (consignes, apport volontaire, etc.). Il faut donc associer les collectivités à l’installation des automates de collecte.
Françoise BESSON
Il n’est plus acceptable de jeter la bouteille en verre avec le tout-venant : cette bouteille a désormais de la valeur. Or, un automate de collecte permet de valoriser, même symboliquement, la bouteille en plastique. Les consommateurs ont davantage confiance dans les automates pour recycler ce produit que dans les bacs de collecte.
Valérie PLAINEMAISON, FNADE
Comment Nestlé Waters réagirait vis-à-vis d’une obligation de réincorporation du recyclage ?
Françoise BRESSON
L’incorporation de la matière recyclée dans le produit à fabriquer est liée à trois types d’enjeux indissociables : la disponibilité de la matière, la qualité et la compétitivité du prix de la matière produite.
Christophe JOURNET, MPE Média
Le recyclage est avant tout une question d’éducation populaire.
Carlos de LOS LLANOS
Sur certaines parties du territoire, la collecte fonctionne bien, le taux de recyclage y est meilleur qu’ailleurs. La difficulté est surtout dans les grandes villes où il faut reconquérir un espace public dégradé.