n°140 - 11 Juillet 2016
COMMUNICATION ET MEDIAS
Les cités fertiles par Vincent CALLEBAUT
Vincent CALLEBAUT, architecte : "Je vais vous présenter quelques projets menés dans le domaine des villes fertiles.
Selon Jeremy Rifkin, l’argent est une donnée qui se divise lorsqu’elle est partagée. A contrario, plus on partage la connaissance, plus on la multiplie. Forts de ce principe, nous pouvons imaginer des villes permettant la symbiose de l’humanité avec son environnement.
En tant qu’architecte, je tente d’initier des boucles vertueuses, pour que les bâtiments produisent leurs propres énergies et recyclent un maximum de déchets. En tant qu’urbaniste, j’imagine la ville-écosystème. Le tout pour passer de l’économie linéaire, qui produit, consomme et jette, à une économie circulaire.
Comme exemple de pistes que j’explore dans mon laboratoire d’architecture, je citerai Lilypad, une ville flottante nomade, destinée à accueillir les réfugiés climatiques. Elle serait fabriquée avec des composants imprimés en 3D sur un matériau à base d’algue verte et de déchets plastiques.
D’autres projets sont, eux, aujourd’hui en chantier.
Ainsi, la tour Tao Zhu Yin Yuan, à Taipei, chargée de 25 000 arbres et arbustes, amène la nature en cœur de ville. Elle présente une consommation énergétique divisée par deux par rapport aux tours avoisinantes. Elle n’emploie pas de béton et est hautement antisismique.
Grâce à la data, il est possible de travailler de façon transdisciplinaire et internationale. En l’occurrence, nous avons collaboré avec des ingénieurs situés à San Francisco, Tokyo et Taiwan. Par la fusion des savoirs, nous faisons breveter des solutions nouvelles, nous inventons une architecture post-carbone, post-nucléaire…
The gate Heliopolis, situé au Caire, est un îlot solaire multifonctionnel de 1 200 logements et un shopping mall. Il est recouvert d’une immense canopée proactive, qui produit toute l’énergie nécessaire au bâtiment. Le tri sélectif des déchets s’effectue sur les paliers. Le tout est monitoré par des technologies immotiques : grâce à la donnée, on anticipe les pics de production.
Je terminerai avec le projet d’urbanisme Paris Smart City, qui vise à remplacer notre modèle d’étalement urbain par une densification verticale.
Nous avons, ici, étudié des architectures comestibles, qui ramènent une nature nourricière au cœur de la ville et luttent contre le phénomène des îlots de chaleur.
Le concept-clé est la solidarité énergétique. Le nouveau bâtiment doit produire de l’énergie et redistribuer la plus-value aux bâtiments anciens.
Aujourd’hui, à partir des technologies existantes, en travaillant de façon transdisciplinaire et internationale, il est possible de valoriser les déchets ; ceci, couplé aux énergies renouvelables, permet de concevoir de véritables territoires à énergie positive.
Pour la gestion des déchets, nous faisons appel à l’immotique. L’idée est que chacun gère et régule ses déchets au jour le jour. Le projet repose sur une certaine démarche pédagogique : les consommateurs doivent devenir acteurs du bâtiment.
La FNADE, ses adhérents peuvent-ils contribuer à cette ville de demain… ? La donnée va devenir une richesse immatérielle. Elle appartient déjà à tout un chacun. Il faut tisser les compétences de ceux qui maîtrisent la donnée."